arrive prestement, et du haut de la barbacane, leur demande courageusement et calmement : « Qui êtes-vous ? — Nous sommes les messagers de mon seigneur Noble le lion, et nous voudrions parler à Renart. » À cette réponse, le portier tire la porte coulissante vers le haut. Grimbert s’avance le premier en entrant à reculons. Il passe la première porte, et dit au milan : « Avancez donc, seigneur Hubert, mais baissez-vous car l’entrée est basse. » Hubert répond : « Je crains que Renart n’essaye de se remplir la panse avec moi une fois de plus. Je préfère rester ici et vous attendre jusqu’à votre retour, car je préfère être à l’aise qu’à l’étroit. » Grimbert n’y voit pas d’inconvénient et continue jusqu’à Renart, qu’il trouve fort souffrant. Renart demande alors ce qu’il lui veut. Grimbert répond : « Mon cher voisin, je suis votre cousin germain, et j’ai beaucoup d’affection pour vous. Monseigneur Rohart le corbeau est venu à la cour se plaindre de vous. Son mauvais état ne plaît pas du tout au roi ni à ses barons. Ne le prenez pas mal s’il vous demande de bon droit de venir immédiatement à lui pour vous expliquer sur cet incident. Vous ne pouvez pas lui refuser de vous rendre à la cour pour que justice soit faite. — Cousin, je n’en ai rien à faire. Dorénavant, je n’irai plus à la cour, car on m’y a fait trop de misère. Voici ce que vous direz au roi lorsque vous serez devant lui : le corbeau m’a tué, et dans ce tombeau, surmonté d’une croix sous un buisson, Hermeline, votre parente et amie, m’a fait enterrer dans la douleur et le chagrin. Vous trouverez après la porte en repartant la tombe d’un paysan du nom de Renart. Regardez bien le nom inscrit dessus pour le rapporter au roi. Au moment de partir, Hermeline vous accompagnera au-dessus de la tombe qui vient d’être terminée. Mon fils Rouvel sera avec. — D’accord, répond Grimbert, alors je vais prendre congé de vous. » Là-dessus, Grimbert le quitte et retrouve mon seigneur Frobert et Tardif, ses deux compagnons. Hermeline et Rouvel son fils les emmènent tout droit au tombeau et leur disent : « Cher seigneurs pour notre grand malheur, Renart le goupil repose dans cette tombe. Lisez l’inscription et priez Jésus-Christ pour qu’il ait pitié de son âme. Je reste seule, lasse et désemparée, avec mes enfants maintenant orphelins. Je n'ai ni vêtement de toile ou de lin, je me trouve dans une grande pauvreté. » Sur ce, elle rentre chez elle à Maupertuis et les autres s’en retournent d’une traite jusqu’au pavillon du roi. Puis ils se mettent à genoux devant lui. Grimbert a les yeux mouillés d’avoir trop pleuré. Quand le roi Noble le voit sangloter, il se met en colère, mais le milan intervient aussitôt : « Sire, nous venons de Maupertuis, mais on s’est bien moqué de nous, car Renart est mort et enterré. Quand Rohart s’est réfugié ici, Renart était déjà si mal en point qu’il est maintenant six pieds sous terre. Nous avons vu son tombeau, et nous savons de source sûre, que le corbeau, certes sans force maintenant, l’a achevé. Lui est blessé mais Renart est bel et bien mort. Que le Saint Esprit prenne soin de son âme, et l’emmène au paradis, bien à l’intérieur, loin des pauvres et des mendiants. » La nouvelle ravive la colère du roi, mais en faveur de Renart cette fois. Il se lève aussitôt et dit malheureux et déconcerté : « Par notre grande faute, nous avons perdu le meilleur baron que j'avais. J’ai bien peur que je ne pourrai jamais le venger. J’aurai pourtant donné la moitié de ma fortune pour éviter cela. » Là-dessus, il sort de son pavillon et remonte dans son palais. Ainsi se terminent les funérailles et la vie de Renart, et disparaît son nom à jamais. | 25680 25684 25688 25692 25696 25700 25704 25708 25712 25716 25720 25724 25728 25732 25736 25740 25744 25748 25752 25756 25760 25764 25768 25772 25776 25780 25784 25788 25792 25796 | Qui torse et velue ot la keue, D'en haut desus la barbakeue Lor escria con preu et sage : « Qui estes vous ? — Sonmes mesage Mon seigneur Noble le lion, Que Renart parler voulion. » Quant li portiers l'ot, de volee La porte qui estoit coulee A mont a trere conmença. Grinbert qui d'antrer s'avança I est a reculons entré. Quant le premier huis ot outré, Si dist a l'escoufle Grimbert : « Venez avant, sire Hubert, Bessiez vous, que basse est l'entree. » Dit Hubert : « Je dout que vantree Ne face, par saint Lienart, De moi encore anuit Renart. Ici iluecques me tendré, Tant que vous viengniez atandré, Miex meing au large qu'a l'estroit. » A Grimbert convient qu'il otroit Ce que frere Hubert conmande. Ainz vint et Renart li demande, Conme cil qui mout se doloit, Que il queroit et qu'il vouloit. Grinbert li a dit : « Biau voisin, Je sui vostre germain cousin, Si vous devroie mout amer. A court vous est venuz blasmer Mon seignor Rohart le corbel. De son domage n'est pas bel Au roi ne a sa baronnie. Ne le tenez a vilanie, Par moi vous mande, et il a droit, Que viengniez a li orandroit Por vous de ce blasme escuser. Ne devez mie refuser Qu'a court ne viengniez pour droit faire. — Cousin, de ce n'ai je que faire ; Ne veil or plus aler a court, Que trop m'i a l'en tenu court. Ceste parole me randroiz Au roi quant devant li vendroiz, Qu'a la mort m'a mis le corbel, Et la dehors souz ce tombel, A cele croiz, souz cele espine Me fist enfouir Ameline Vostre amie, vostre parente Qui iriee en est et dolante. Quant hors de la porte seroiz, .I. tombel iluec trouveroiz D'un vilain qui Renart ot non. Desus verrez escrit le non, Et ainsi au roi le diroiz Quant de ci vous departiroiz. Hermeline vous menra droit Desouz le tombel orendroit Qui est touz fres et tout novel ; O lui ira mon fiuz Rouvel. — Ainsi, dist Grinbert, l'ostroi gié, Si m'en vois a vostre congié. » A tant se departi Grimbert, Si trova mon seignor Frobert Et Tardif, plus compaignons n'a. Tout droit au tombel les mena Hermeline et Rovel son fill, Et distrent : « Renart le gorpill De quoi il ne nos est pas bel, Biau seignors, gist souz cest tombel. Lisiez les letres et l'escrit, Et si priez a Jhesu Crist Que il ait de s'ame merci. Lasse, esgaree ! remoing ci, Et mi enfant sont orfelin. N'ai robe de drap ne de lin, A grant povreté sui remese. » A cest mot entra en la hese De Maupertuis, et cil s'en tornent Qui de ci au roi ne sejornent. Trové l'ont en ses paveillons, De devant lui a genoillons S'est maintenant agenoilliez. Grimbert qui ot les eulz moilliez Du plorer que il fet avoit. Et quant li rois Noble le voit Plorer, si en fu trop plains d'ire, Li escouffle li prist a dire : « Sire, de Maupertuis venons Dont a engigniez nos tenons. Renart est morz et enfoï. Quant Roarz ceenz a foï, Si durement estoit malmis Renart qu'il est en terre mis. La fosse et le tombel avons Veüe, tout de voir savons Que le corbel le partua Qui ore pou de vertu a. Mehaingnié en est et periz Est Renart. Li saint Esperiz De la seue ame s'entremete Tant qu'en paradouse la mete, .II. liues outre paradiz Ou nus n'est povre ne mandis. » Quant li rois oï la nouvele, Tout son courrous li renouvele ; De Renart fu mout courrouciez. Tantost s'est en estant dreciez Et dist dolanz et esperdu : « Par grant pechié avons perdu Le meilleur baron que j'avoie, Ne ne cuit mie que ja voie Que je venjance en puisse avoir. Por la moitié de mon avoir Ne vousisse qu'il fust ainssi. » A tant fors de son tref issi Et s'en monta en son palés. Ici luec de Renart vous les La vie et la procession. Ci fine de Renart le non. |
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