a mené l’essentiel du temps une vie de martyr et d'apôtre. Espérons que nous mènerons tous une vie de repentir aussi bonne que lui, car je n’ai aucun doute que l’issue soit la bonne pour lui. Il n’a jamais été tenté par la méchanceté ou la folie, et a toujours vécu sans perfidie, ni malice, ni orgueil. Jamais personne n’a vu de prince de sa trempe. Et s’il a volontiers baisé, il ne faut pas en faire une histoire. Il n'y a pas en ce monde de roi ou de comte qui n'a jamais baisé ou qui ne baise plus, ça ne fait aucun doute. Il convient, à mon humble avis, de baiser, car je vous le dis à tous, baiser n’a jamais été défendu, c’est pour cela que le con est fendu. Je recommande à chacun, ici même, lorsque sa verge est dure et raide, de trouver un con disponible et de le baiser, car il sera pardonné et rien ne lui sera reproché. Quand la verge est bien séparée des couilles, baiser n'est pas un péché, pas plus que de faire des andouilles, boyaux après boyaux. Tout le monde joue avec ce jouet, et Renart a baisé de bon gré. Son cœur a été tout entier pour dame Fière, et je n’ai pas peur qu’il me frappe de le dire ici puisqu’il est mort. Mon cher roi, au nom de Dieu, faites crier dans tout votre empire que ceux qui baisent ne sont pas les pires. Je pardonnerai leurs péchés, et si je pouvais les récompenser avec de l’argent, je le ferais volontiers tout en les pardonnant. Ce n’est pas une promesse en vain, car ici même et devant Dieu, je leur pardonne de baiser. Ils auront pour pénitence, de manger de la viande à volonté pendant une semaine. Ceux qui ignorent mon commandement, hommes, femmes ou bêtes, et qui ne baisent pas de plein gré, seront couverts de chaînes en fer de la tête aux pieds dans les tourments de l'enfer ! Alors que ceux qui m’écoutent iront au paradis avec Dieu. » Une fois le sermon terminé, le bon archiprêtre Bernard continue la cérémonie, par un confiteor puis prononce l’oraison funèbre de Renart : « Ah, Renart, mon ami, fait-il, vous avez visité tant d’endroits, bois, forêts, plaines, pour remplir votre ventre et apporter à Hermeline, votre femme, un coq, une poule, un chapon, une oie ou un oison gras. Ils tombaient toujours à point quand vous pouviez en attraper. Mais vos actes de bravoure et vos bonnes actions n’auront plus lieu. Jamais plus de tel prince ne verra le jour ! Seigneur Renart, Hermeline va se sentir bien seule. Elle n’aura plus de bon traitement, comme vous saviez bien lui donner. Elle devra maintenant se contenter de se frotter le bas-ventre avec les mains : elle allait au mieux, maintenant elle ira mal. Une queue de cerise n’y changerait rien puisqu'elle a perdu votre soutien. » Après que Bernard, à sa façon, a bien terminé son oraison et captivé son auditoire, Brichemer commence l'épître haut et fort pour que tous et toutes l’entendent bien : « Renart, fait-il, vous avez effrayé sans aucun doute bien des poules et des oies dans leurs granges ou leurs abbayes, puis joué de la mâchoire sur elles tout autant. Vous avez aussi reçu de nombreux coups sur le dos et la croupe. Vous avez trompé les moines blancs, qui ont dû se coucher tard et se lever tôt, pour vous guetter en cachette, ce qui leur a été très pénible. Tu leur as volé en traître nombre de poules et de poussins, mais nous te pardonnons pour tout ce que tu leur as pris. Renart, reçois l’absolution ! Je prends tes péchés sur moi, et ainsi, je t’absous mon ami. » | 24964 24968 24972 24976 24980 24984 24988 24992 24996 25000 25004 25008 25012 25016 25020 25024 25028 25032 25036 25040 25044 25048 25052 25056 25060 25064 25068 25072 | Si a a son tens demenee Vie de martir et d'apostre. Einssi feïssent tuit li nostre, Et aussi bonne repentance, Qar de lui ne sui en doutance Qu'il ne soit a bone fin pris. Onques nul jor ne fu espris De mauvestié ne de folie. Il a esté sanz vilanie Et sanz malice et sanz orgoil. Onques nul jor ne virent oil Prince qui fust de sa vertu. Se il a volentiers foutu, L'en n'en doit tenir plet ne conte. Il n'a el monde roi ne conte Qui n'ait foutu ou qui ne foute, De ce ne sui je pas en doute. Foutre covient, si con moi semble, Por ce vos di a touz ensemble Que foutre n'ert ja desfendu. Por foutre sont li con fendu. Je conmant a touz orendroit ; Qui avra le vit dur et roit, S'il a le con abandonné, Le foutre li soit pardonné, Ja ne li sera reprouchié, Qar de foutre n'est pas pechié, Puis que vit soit partiz de coille, Ne que il est de fere andoille Qui vet de bouel en bouel. Tuit se gieuent de cest jouel. Renart a foutu volentiers. A Renart a esté entiers Ses cuers et a ma dame Fiere, Mort est, n'ai peor qu'il me fiere Por chose que je racont ci. Biau sire rois, por Dieu merci, Faites crïer par vostre empire Que qui foutra ja n'en soit pire. Le pechié lor voil pardonner, Et se lor pouoie donner Rentes, volentiers lor donroie, Et le pechié lor pardonroie. Ne lor pramet pas en pardon Ci et devant Dieu lor pardon Quant que a foutre mesprandront. Tele penitance enprandront Que il mengeront a estraingne Char toute longue la semaingne, Et qui de mon conmant istra Et qui volentiers ne foutra, Soit home, soit fame, soit beste, Et piez et mains et cors et teste Li soit de cheennes de fer Lïez el grant torment d'enfer. Et cil qui mon conmant feront En paradis o Dieu seront. » Quant l'arceprestre ot finé Son sermon et determiné, De son servise s'avança. Son confiteor conmença Le bon arceprestre Bernart, Puis dist l'oroison por Renart : « Haï, dist il, Renart, amis, En maint pertuis vos estes mis En bois, en forest et en plain Por avoir vostre ventre plain, Et por porter a Hermeline Vostre fame coc ou geline, Chapon ou oue ou cras maton ; Tot jors estoient en saison, Qant vos les pouiez tenir. Or estuet a noient venir Les granz hardemenz c'avez fait Et les biens dont estes retrait. Ja mes tel prince ne morra. Sire Renart, or demorra Hermeline mout esgaree, Ja mes n'avra de bien denree. Bien le saviez procurer, Or li covient metre tremper Son ventre oveques ses mains : Du plus estoit, or est du mains. N'avra mes vaillant une alie, Puis qu'ele a perdu vostre aïe. » Quant Bernart ot en sa reson Bien definee s'oroison Et aproprié son chapistre, Brichemer conmença l'espistre, Que bien l'oïrent toz et toutes : « Renart, fait il, sanz nule doutes Por vos ont esté esbaïes En granches et en abaïes Mainte geline et mainte oe. Mainte foiz vos en est la joe Remuee et touz les os Maint coup en avez sor le dos Et sus le crepon receü. Maint blanc moine avez deceü Et fait, dont mout lor doit grever, Tart couchier et matin lever Por agaitier en larrecin. Mainte geline et maint poucin Leur as emblé conme felon, Mes de tout ice t'asolon. De quant que tu lor as tolu, Renart, soies tu asolu. Li pechiez en soit sor moi mis, Einssi asou ge mes amis. » |
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