en l’entendant soupirer, et lui dit : « Je ne sais que faire, madame, quand je vous vois avoir tant de chagrin. Faites préparer un bain car j’ai envie de me baigner un peu. — Seigneur, fait-elle, je ferai volontiers tout ce dont vous avez besoin. » Elle ordonne alors qu'on lui fasse chauffer un bain, ce qui est fait sur-le-champ. Ils portent ensuite seigneur Renart jusqu’à la baignoire et le mettent dedans. Dame Fière lui dit : « Mon ami, je ne m’en remettrai jamais. — Je suis dans le mal à cause de ma bêtise, et je crois que je vais mourir dans la douleur. Il me coûte aussi, à cause de votre amour, de devoir vous quitter ainsi, car je crois que je ne tiendrai pas jusqu’à ce soir. » En entendant ces paroles, Dame Fière a le cœur brisé par le chagrin et la colère : « Hélas ! Je ne connaîtrai plus le bonheur. » À ces mots, ils sortent Renart de la baignoire, et le déposent délicatement dans un lit car il est bien mal en point. Renart demande alors la confession pour sauver son âme. « Croyez-moi, fait-il, le temps presse, faites venir Bernard l'archiprêtre pour que je puisse me confesser et lui dire mes péchés. » Le reine lui répond qu’elle fera tout ce qu’il veut, et convoque Bernard sur-le-champ, car il n’y a pas de temps à perdre. Bernard arrive aussitôt avec son attirail, puis s’assoit sur un banc aux pieds de Renart, et lui dit : « Seigneur, vous voulez vous confesser ? Si vous acceptez de vous repentir, vous serez sauvé. Renoncez au mal et aux vices qui ont souillé votre âme depuis si longtemps. Qui est sage, sait se repentir. — Seigneur, fait Renart, soyez tranquille. Il est normal que vous m’exhortiez ainsi, vous qui êtes honnête et loyal. Vous allez pouvoir m’alléger de mes péchés car je n'ai jamais rien fait de grave. Certes, j’ai baisé dame Hersent ma commère, mais ça n’était pas mal, au contraire je lui ai donné beaucoup de plaisir. Je n’ai pas mal agi non plus envers la reine que j'ai prise de grand cœur comme épouse. Tibert le chat a fait office de prêtre pour célébrer le mariage, même si ça n’a pas plu à tous. Que dire d’autre ? Sachez pour de vrai que je n’ai jamais commis de péché, excepté quand j’ai guéri messire Noble le lion. Certes, j’agissais par intérêt mais j’ai réussi à le guérir. — Renart, Renart, lui répond Bernard, par saint Léonard, tu es vraiment de sale engeance ! En reconnaissant avoir couché avec la reine, c’est donc que tu as commis une faute. Si tu veux être sauvé, tu dois la renier par serment. — Mais comment ? fait Renart, si je dois en réchapper, je renierai ce mariage, et vous pourrez être sûr que pour avoir le pardon je suis prêt à le faire sous serment. Je ne ferai rien, si je dois en réchapper, pour ignorer vos commandements, au contraire je veux bien jurer sous serment. » | 24436 24440 24444 24448 24452 24456 24460 24464 24468 24472 24476 24480 24484 24488 24492 24496 24500 24504 24508 24512 24516 24520 | .I. petitet les euz ovri, Si parla et dist : « A que fere, Dame, vos voi je tel duel fere ? Faites .I. baing apareillier, Qar je me voil .I. poi baignier. — Sire, fet ele, volentiers Ferai ce qui vos est mestiers. » A tant conmande qu'en li face .I. baing chaufer, et sanz espace Fait fu quant il l'ot conmandé. Mon seignor Renart ont porté En la cuve, dedenz l'ont mis. Dame Fiere li dist : « Amis, Ja n'en cuit raençon avoir. — Cest mal ai ge par mon savoir Dont je cuit morir a dolor, Si m'en poise por vostre amor, Qar je cuit de vos departir. Vos ne verrez ja l'aserir. » Dame Fiere l'ot et entent, A poi que le cuer ne li fent, Tant est dolente et corocie : « Lasse ! ja mes ne seré lie. » A icest mot sanz autre plet Ont Renart de la cuve tret, En .I. lit l'ont posé et mis Conme cil qui mout ert malmis. Demandé a confession, S'avra s'ame remission. « Sachiez, fet il, que mout m'est tart, Faites a moi parler Bernart L'arceprestre, si me ferai Confés et mes pechiez dirai. » La dame respondi itant Que ele fera son conmant. Maintenant a Bernart mandé Et il n'i a plus demouré, Ançois i vint sanz atargier A tout ce qu'il li ot mestier. Desus .I. banc as piez Renart S'estoit assis sire Bernart. Il a Renart mis a raison : « Sire, volez confession ? Se vos vos volez repentir, A bone fin pouez venir. Lessiez ester les mauvestiez, Et les vices dont entechiez Avez esté si longuement : Qui sages est si se repent. — Sire, fet Renart, or estez. Se vos a droit m'amonestez Qui preudons estes et loiaux, Vos m'alegerez de toz maux, Qar je n'ai pas mesfet granment. Se j'ai foutu dame Hersent Ma conmere, ne mespris rien, Ançois li fis leece et bien. Ne mespris pas envers ma dame Que j'avoie espousee a fame Et a moillier par grant soulaz. Le prestre fu Tybert li chaz Qui volentiers la m'espousa, A tiex i ot qui en pesa. Que diroie ? De voir sachiez, Je ne fis onques nus pechiez Fors quant je donné garison Mesire Noble le lyon ; Mes bien sai que lores pechai Quant je garison li donnai. — Renart, Renart, ce dit Bernart, Par mon seingnor saint Lienart, Mout es ore de pute orine, Qant tu connois que la roïne As foutue, tu as mespris. S'a bone fin veus estre pris, A forjurer la te covient. — Conment ? fait Renart, s'il avient Que je aie respassement, Je fauseré le serement, Et vos porrez de fi savoir Que por la repentance avoir Le serement otroi je bien ; Et pour ce n'en feré je rien, Se je du mal puis respasser. Mes por ce que ne voil passer Vos conmandement ne desfere, Voil je bien le serement fere. » |
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