vendredi 10 mai 2019

La mort de Renart - Renart et Couard devant le roi




— Écoutez seigneur, dit Couard,
S


ire, dist Coart, entendez,
malgré toute l’amitié que vous avez pour moi,
si vous n’y voyez pas d’inconvénient,
j’irai quand même à la cour chercher
réparation, c’est mon droit.
— Ma foi, dit Renart, il serait normal
que j’y aille aussi si vous êtes d’accord. »
Sur ce, Renart et Couard se lèvent,
tout contents,
et se mettent aussitôt en route
d’une seule traite jusqu’aux portes du palais,
Couard transportant son pelletier.
Les deux barons arrivent
chez Noble le lion,
sans encombre ni empêchement
Suite aux remarques précédentes de Renart,
Couard ajoute : « Mon cher ami,
ce paysan que j’emmène, m'a causé
beaucoup de tracas.
Que tout le malheur s’abatte sur lui
là où Dieu l’enverra !
Nous verrons bien ce que le roi
et ses barons diront lors du jugement,
et par quel supplice
nous mettrons ce paysan à mort. »
Renart répond : « Je ne désire rien d’autre
que vous soyez vengé de lui. »
Les deux barons montent alors à l’étage
en toute hâte,
et trouvent le roi dans la grand-salle,
entouré de nombreuses bêtes.
Ils fêtent l’anniversaire de la disparition
d'une grande et noble dame,
la sœur de Pinte, dame Coupée,
tuée par traîtrise.
Le roi Noble et ses barons
sont tous rassemblés
pour assister au service.
Nombreux sont les princes et les barons
de grande renommée,
tous vêtus de vair,
sachez-le bien.
Le roi tient cour plénière,
avec dame Fière à ses côtés,
tous deux entourés de leurs barons.
Voici alors nos deux compères,
Renart et Couard, poussant
le paysan par la porte d’entrée.
Messire Renart s’avance
et salue le roi aussitôt,
comme il a bien appris,
puis s’agenouille devant lui.
Le roi, qui l’a en grande affection,
le relève
et lui dit : « Soyez le bienvenu !
Mon ami, vous faites bien de venir me voir,
cela faisait longtemps
depuis que nous avons conclu la paix
avec vous et vos compères.
Je suis vraiment content
de votre visite,
je le jure sur l'âme de mon père,
sachez que je vous en sais gré. »
Renart, loin d’être troublé,
lui répond aussitôt :
« Sire, que Dieu, qui jamais ne nous fait défaut,
exhausse au moins la moitié
de vos vœux, car je sais en vérité
que vous avez de l’amitié pour moi,
foi que je dois à saint Germain.
Mon ami Couard et moi-même
avons besoin de vos lumières
sur une affaire.
— Que Dieu m’aide, seigneur Renart,
fait le roi, mais que dites-vous là ?
Avec l’aide du Saint-Esprit,
je vous donnerai volontiers conseil.
Mais dites-moi donc, mon cher ami,
pour quoi vous sollicitez mon avis.
— Sire, fait-il, je vais vous le dire. »


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Or sai de voir que vos m'amez ;
Mes s'il vos estoit a plaisir,
A cort iroie pour oïr
Le jugement dont sui destroiz.
— Par foi, dist Renart, il est droiz
Que i voise quant le volez. »
A tant est en estant levez
Renart et Couart a grant joie,
Si se metent tost a la voie,
Ne finerent jusques a la porte,
Et Coart son peletier porte.
A sire Noble le lyon,
Andui i viengnent li baron
Sanz desfense et sanz contredit.
Renart si a a Coart dit.
Coart li dist : « Biax douz amis,
Le vilain que je port m'a mis
En grant travail et en grant painne.
Diex le mete en male semainne
Qui en avant le portera !
Or verrons que li rois dira
Et li baron del jugement,
A quel que paine a quel torment
Feromes le vilain morir. »
Respont Renart : « Mout le desir
Que l'en vos ait de lui vengié. »
Maintenant montent le planchié
Li dui baron par grant desroi,
En la sale trovent le roi,
Et ot entor lui mainte beste.
Cel jor celebroit une feste
D'une haute dame honoree,
La suer Pinte, dame Coupee,
Qui fu en traïson ocise.
Le jor en fesoient servise
Li rois Noble et son barné
Qui la estoient assemblé.
Maint prince i ot et maint baron
Qui mout furent de haut renon ;
Tant estoient, se vos plevis,
Vestuz et de ver et de gris.
Li rois qui tenoit cort pleniere
Seoit delez ma dame Fiere,
Et li baron environ eus.
Es vos les compaingnons entre eus
Renart et Coart qui aporte
Le vilain tres par mi la porte.
Mesire Renart vint devant,
Le roi salue maintenant,
Con cil qui bien fu ensaigniez,
S'est devant lui agenoilliez ;
Et li rois qui mout chier l'avoit,
L'a redrecié quant il le voit,
Et dist : « Bien soiez vos venuz !
Amis, bien vos estes tenuz
De moi veoir ; ne vos vimes
Des que nos feïsmes la pes
De vos et de vostre compere.
Foi que je doi l'ame mon pere,
Or serai je joianz et liez,
Des qu'a moi estes repairiez ;
Sachiez que bon gré vos en sai. »
Renart ne fu pas en esmai
De respondre, si dist itant :
« Sire rois, cil Dieu qui ne ment
Vos otroit de vostre voloir
La moitié, quar je sai de voir
Que vos m'amez de cuer certain,
Par la foi que doi saint Germain.
Mes d'une afere vos requier
Conseil, qar bien en ai mestier
Moi et mon compaingnon Coart.
— Diex aïde, sire Renart,
Fait li rois, qu'est ce que vos dites ?
Issi m'ait saint Esperites,
Conseil vos donré volentiers.
Mes or me dites, amis chiers,
De quoi vos demandez conseil.
— Sire, fait il, dire vos voil. »
Comment Renart fut empereur Ce est la branche Renart coment il fu Empereres (30)
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