il éperonne rageusement son cheval pour le lancer aussi vite que possible. Leurs lances se brisent lors du choc, mais chacun continue son chemin à toute allure sans se faire plus de mal. Ysengrin, sur un cheval d’au moins cent besants d'or, se précipite vers Bruyant le taureau la lance pointée droit devant lui. Bruyant arrive à sa rencontre à toute vitesse. Dès qu’ils le peuvent, ils se donnent un grand coup de lance aux pointes bien tranchantes. Ysengrin, le plus valeureux des deux, le frappe avec une telle force que sa lance lui transperce le corps, et le fer ressort de l’autre côté d’une bonne main. Bruyant tombe de son cheval en poussant un hurlement qui fait frémir toute l’armée. Quand le roi Noble entend ça, il fonce aussitôt de ce côté, et trouve Bruyant étendu de tout son long au milieu de l’herbe, sans un souffle de vie. Le roi ne peut plus rien faire pour lui : « Hélas ! fait-il, si seulement j’avais été là ! Que reste-t-il à faire sinon venger mon baron de ce traître de félon ? Il est inutile d’attendre davantage. Il m’aimait et tenait beaucoup à moi. » Il éperonne alors son destrier de Castille, la lance dressée, la bannière flottant au vent. Il passe devant les siens à toute allure, fou de rage. Mais un chevalier se détache des rangs et vient rapidement à sa rencontre. Le roi lui donne un coup si fort que sa lance lui transperce le corps, et le fer ressort de l’autre côté d’une bonne demi-toise. Quand sa lance fléchit, il le laisse tomber mort au milieu du pré. Malebranche l’interpelle en voyant ça, et se dirige vers lui, furieux de voir son homme mort. Il est plein de colère et de peine. Il s’élance alors contre le roi. Mais le roi l’a repéré, et court aussitôt à sa rencontre en éperonnant son destrier, bien calé dans ses étriers. Malebranche s’élance de son côté à travers un essart. À l’approche du roi, il serre son bouclier fermement contre lui. Il est plein de rage et de colère. Le roi l’est tout autant. Ils se heurtent sans hésiter. Malebranche brise sa lance, car le roi le frappe sans retenue. Sa lance lui transperce le corps jusqu’à la bannière, et le fait tomber raide mort de son destrier. Renart arrive à la rescousse, mais il est trop tard. Tous les siens arrivent à sa suite, mais ça ne sert plus à rien, il est bel et bien mort. « Je ne m’en consolerai jamais, dit Renart, mais qui m’aime me suive pour aller le venger sur-le-champ. — Seigneur, lui disent ses barons, nous vous aiderons de ce pas. » Ils se jettent alors dans la mêlée. Nombre de coups d’épée sont donnés, nombre de bêtes tombent mortes. Personne ne peut résister contre l'épée de Renart, mais Ferrant arrive sur lui avec une compagnie de deux mille soldats pour venir en aide au roi. La bataille fait rage, mais les hommes de Renart tombent, impossible d’en faire le compte ! Renart n’est pas d’humeur à plaisanter. | 23808 23812 23816 23820 23824 23828 23832 23836 23840 23844 23848 23852 23856 23860 23864 23868 23872 23876 23880 23884 23888 23892 23896 | Contre lui broche par aïr Quant que cheval puet randonner. Lor lances bruisent au joster, Ambedui tout conmunement Outre s'en passent vistement, L'un a l'autre plus ne forfist. Ysengrin sor .I. cheval sist Qui bien valoit .C. besanz d'or. Il broche vers Bruiant le tor La lance droite randonnant, Bruiant revint esperonant. Si tost con il porent venir, Granz cox se vont entreferir Des lances o les fers tranchanz. Ysengrin qui mout fu vaillanz Le feri de si grant vigor Que de la lance travers dor Li mist el cors et le fer tout, D'autre part en voit on le bout. Du destrier a terre le met, Au trebuchier jeta .I. bret Si grant que tot l'ost en fremi. Et li rois Noble l'entendi, Cele part vint esperonant, Si a trové Bruiant gisant Tout estendu en mi la pree ; L'ame li est du cors sevree. Quant li rois le voit estendu : « Alas ! fet il, c'ai atendu, Que ne vois vengier mon baron Del traïtor et du felon ? Qu'atent, que ne le vois vengier ? Il m'amoit tant et tenoit chier. » Lors point le destrier de Castele, La lance o le penon ventele A desploiee maintenant. Devant sa gent s'en va poingnant Tot hors du sens, toz esragiez. .I. chevalier s'est desrengiez Qui encontre lui esperonne. Mes li rois si grant cop li donne De la lance par mi le cors Que le fer en parut dehors ; Je cuit plus de demie toise. A ce que la lance pantoise, L'a trebuchié mort enz el pré. Malebranche en a apelé Qui l'ot esgardé et veü, Si est icele part venu. Malebranche fu aïré Quant son home vit mort jeté ; Mout en fu dolent et iriez. Envers le roi s'est eslessiez, Et li rois qui bien l'aparçut Maintenant cele part corut, Qant que il pot point le destrier. Bien fu afichié en l'estrier ; Et Malebranche d'autre part S'eslaisse par mi .I. essart. Si tost con a veü le roi, L'escu enbrace par desroi, D'ire et de mautalent espris. Et li rois fu mautalentis, Si se fierent sanz demorance. Malebranche brise sa lance, Et li rois le fiert a bandon, Que la lance jusque au panon Li fist par mi le cors glacier, Mort l'a abatu du destrier. Por lui rescorre vint Renart, Mes il i est venuz trop tart ; Il et sa gent i sont venu, Mes malement l'ont secoru, Car il l'ont trové trestot mort. « Ci n'a, dist Renart nul confort, Mes or verrai qui m'avra chier, Qar je le voil aler vengier. — Sire, ce dient li baron, Volentiers vos aïderon. » Adonc conmença la mellee. Maint coup i ot feru d'espee, Mout veïssiez bestes morir, Onques nus ne se pot tenir Encontre l'espee Renart, Quant Ferrant s'en vint cele part Tiex .XXM. en sa compaingnie Qui au roi feront grant aïe. En l'estor se fierent errant, Des genz Renart ont ocis tant Que je n'en sai le conte dire ; Lors n'ot Renart talent de rire. |
L23827 : comme c'est Ysengrin qui tue Bruyant, je pense qu'il faudrait mettre : Il le fait tomber de son cheval (sous entendu Ysengrin)
RépondreSupprimerExact, en fait c'est une coquille, c'est bien Bruyant qui tombe de son cheval.
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