mais, n'en déplaise à Dieu, c'est un gros mensonge ! Néanmoins, je veux bien vous l'expliquer car je me sens fort capable de vous répondre. Cette chose que vous avez vue pendant votre sommeil, qui portait une pelisse rousse, et qui vous a ainsi décontenancé, c'est le goupil, j'en suis sûre. Vous pouvez bien vous en rendre compte à la pelisse rousse qu'il vous a enfilée de force. Le collet en os, ce sont ses dents avec lesquelles il vous avalera. L'encolure qui n'était pas droite mais étroite, et qui vous faisait mal, c'est la gueule de la bête avec laquelle il vous serrera la tête. C'est par là que vous y entrerez, vous le verrez à coup sûr, la queue sera alors sur le dessus. Il en sera ainsi, puisse Dieu me conforter. C'est bel et bien le goupil qui vous prendra en travers du cou quand il viendra. Ni argent ni or ne vous protégeront. Et le poil sera tourné vers l'extérieur, c'est bien sûr, car il porte toujours son pelage à l'envers même quand il pleut à verse. Vous venez d'entendre sans aucun doute la signification de votre songe. Je vous le dis avec assurance qu'avant que midi soit passé il viendra, c'est la vérité. Si seulement vous vouliez me croire ! Nous retournerions sur nos pas, sinon ! Mais il est caché là derrière dans ce buisson, j'en suis sûre, pour vous tromper et vous prendre en traître. » | 1404 1408 1412 1416 1420 1424 1428 1432 1436 1440 | Mes se Dieu plet, ce ert mençonge. Neporquant jel vos voil espondre, Que bien vos en savré respondre. Cele chose que vos veïstes El someillier que vos feïstes, Qui le rous peliçon portoit, Qui einsi vos desconfisoit, C'est li gorpiex, jel sai de voir. Bien le pouez aparcevoir Au peliçon qui rous estoit Et que par force vos vestoit. Les goules d'os erent les denz A qoi il vos metra dedenz. La chevesce qui estoit droite, Qui si vos ert male et estroite, Ce est la goule de la beste Dont il vos estraindra la teste. Par illeques i enterrez Sanz faille, que vos le verrez, Lors sera la queue deseure. Einssi ert, se Diex me seceure. C'iert li gorpil qui vos prendra Par mi le col quant il vendra ; Ne vos garra argent ne ors. Et le poil ert tornez defors : C'est voir que tot jors porte enverse Sa pel quant il plus pluet et verse. Or avez oï sanz faillance Du songe la senefiance. Tout seürement le vos di Que ainz que soit passé midi, Vos avendra, ce est la voire. Mes se vos me voulïez croire, Nos retornerions ariere Car il est muciez ça deriere En cel buisson, jel sai de voir, Por vos traïr et decevoir. » |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire