jeudi 12 mars 2009

Prologue - Renart et Ysengrin, parents et amis




Tout pareillement, Ysengrin est d'autre part
T


out ensement de l'autre part
l'oncle de Renart :
le loup fait du goupil son neveu,
et le goupil du loup son oncle.
Ainsi comme je vous le dis,
ils sont entre eux parents et amis;
ils ne sont proches autrement,
si mon bon livre ne me ment point.
Parce que le goupil dit,
quand il va avec le loup :
« Mon cher oncle, que voulez-vous faire ? »,
il veut gagner son amitié.
Le loup parle avec une attention délicate
au goupil, à l'égard de qui il n'a aucune haine.
Par amitié, ils s'appellent
oncle et neveu quand ils se voient.
On peut facilement comprendre de Renart
la grande intelligence, à qui veut bien l'entendre;
or ce Renart représente pour nous,
ceux qui sont plein de mauvaise vie,
qui n'arrêtent pas de chercher
comment ils peuvent tromper autrui.
Mais le félon ne sera pas content
le jour où il ne trompera pas autrui.
Ils sont égaux devant le trompeur :
intimes, étrangers, et amis.
Il n'en épargnera jamais un seul,
même un ami très cher ne le sera pas.
En plus de cette félonie
il a le cœur tout plein d'envie,
et l'envie est cette racine
d'où tous les maux prennent leur origine.
Avec la félonie et l'envie
la pingrerie est leur amie,
et la pingrerie est cette chose
que d'avoir toujours la bourse close.
La pingrerie est un vice
qui aime beaucoup l'avarice.
L'avarice s'est emparée du monde par surprise,
on est déclaré pauvre et malheureux,
si on n'a pas de rente, ou si on ne prête pas à usure.
J'ai peut-être dépassé la mesure,
pourtant c'est bien ceux qui ont de grosses rentes,
qui causent de grands maux.
On pourrait en parler avec plus de mépris encore,
mais je ne prendrai pas la peine d'en dire davantage.
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Ysengrin li oncle Renart :
Le leu fet du gorpil neveu,
Et le gorpil oncle du leu.
Sifaitement con je vos di,
Sont entre eus parent et ami :
Ne s'apartienent autrement,
Se mes bons livres ne me ment.
Por ce que le gorpil disoit,
Qant il avec le leu aloit :
« Biaus oncles, que volez vos fere ? »,
Le voloit a s'amor atrere.
Li leus disoit par amor fine
Au gorpil vers qui n'ot haïne.
Par amistié s'entrapeloient
Oncle et neveu quant se voient.
A Renart puet on bien aprendre
Grant sens qui bien i velt entendre,
Car cil Renart nos senefie
Ceus qui sont plain de male vie,
Qui ne finent del agaitier
Con puissent autrui engingnier ;
Ne ja le fel liez ne sera
Le jor q'autrui n'engingnera.
A l'engingnier li sont honi
Privé, estrange et ami.
Ja .I. sol n'en espargnera,
Ja si chier ami ne sera.
Et avec cele felonnie
A il le cuer tot plain d'envie,
Et envie est cele racinne
Ou touz li max pranent orine.
Avec felonnie et envie
Escharsetez est lor amie,
Et escharsetez est tel chose
Que tout jors a la borse close.
Escharsetez est une vice
Qui forment aime avarice.
Avarice a le mont sorpris :
Cil est clamez dolent chaitis,
Se rente n'a, se il n'usure.
Or ai passé outre mesure,
Que cil qui les granz rentes ont,
Ce sont cil qui grant mal en font.
Mout en puet l'en vilment parler,
Mes je n'ai soing de plus conter.
Les exploits de jeunesse de Renart Les enfances Renart (1)
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