Il regarde à travers un champ en culture, et voit Tibert qui s'amuse tout seul, sans compagnie : il va en jouant avec sa queue, et en tournant autour de lui-même. Alors qu'il fait un saut, il se retourne et voit Renart. Que le feu de l'enfer le brûle ! Il l'a bien reconnu à son poil roux : « Seigneur, fait-il, soyez le bienvenu. » Renart répond avec méchanceté : « Tibert, je ne vous salue point. Ne venez jamais là où je suis, car, je jure sur ma tête que je vous ferais volontiers mal si j'en avais l'occasion. » Il serait maintenant préférable que Tibert se taise car Renart est très en colère. Pourtant il se gratte, puis se dirige vers lui tout simplement et sans faire de bruit. Il dit : « Cher seigneur, il m'est très pénible que vous soyez irrité contre moi. » Renart est vraiment mal en point à force de jeûne et de mauvais traitements; il n'a soin de lui chercher querelle car il est resté sans manger toute la journée. Tibert, lui, est frais et dispos : ses moustaches sont toutes blanches, ses dents tranchantes et aiguës, et ses griffes bien longues pour écorcher. Si Renart essayait de le mater, je crois qu'il se défendrait volontiers. Renart souhaite plutôt n'engager aucun combat contre Tibert, bien qu'en d'autres lieux il en eût envie. Il choisit alors ses mots d'une autre manière : « Tibert, fait-il, j'ai entrepris une guerre très dure et cruelle contre mon compère Ysengrin. J'ai enrôlé beaucoup de soldats, et je souhaiterais tant vous prier de rester avec moi et à ma solde. Car avant que soit conclue une trêve entre moi et lui, je compte lui causer de gros ennuis. » | 1656 1660 1664 1668 1672 1676 1680 1684 1688 1692 1696 | Garda par mi une costure, Si voit Tybert qui se deduit Sanz compaingnie, sanz conduit. De sa queue se vet jouant, Et entor soi feste fesant. A .I. saut qu'il fist se regarde, Et vit Renart que mau feu arde, Si le connut bien au poil rous. « Sire, fet il, bien veniez vous. » Renart respont par felonnie : « Tybert, je ne vos salu mie. Ja mar vendroiz la ou je soie, Qar par mon chief je vos feroie Volentiers mal, s'en avoie aise. » Or covient que Tybert se taise, Que Renart est mout corouciez. Et cil se rest vers lui dreciez Tot simplement et sanz grant noise. Il dist : « Biau sire, mout me poise Que vos estes vers moi iriez. » Et Renart fu mout enpiriez De jeüner et de mal traire. N'a ore soing de noise faire, Que mout a jeüné le jor. Et Tybert fu plain de sejor, Si ot toz les grenons chanuz Et les denz tranchanz et aguz, Et les ongles granz por grater. Se Renart le voloit mater, Je cuit qu'il se voudroit desfendre. Mes Renart ne velt mie emprendre Envers Tybert nule mellee, Que en maint lieu ot desirree. Les moz retorne en autre guise : « Tybert, fet il, je ai emprise Guerre mout durement amere Envers Ysengrin, mon compere. S'ai retenu maint soudoier, Et vos en voil je mout proier. O moi remeingniez en soudees, Car ainz que soient acordees Les trives entre moi et lui, Li cuit je fere grant anui. » |
Oui, mais quel est la morale
RépondreSupprimerIl faut lire toute l'histoire. Dans l'épisode Renart pris au piège, Tibert fait tomber Renart dans le piège qu'il avait lui-même tendu. La morale est donnée par Tibert lui-même, vers 1783-1787 : « Seigneur Renart, le chat n'est pas né d'hier, votre fourberie vaut bien peu. Vous resterez ici cette nuit, à malin, malin et demi. »
RépondreSupprimerC'est bien mais long à lire !!!
Supprimer1662: "Et voiT Renart"
RépondreSupprimerLa faute est corrigée. Merci de l'avoir signalée.
RépondreSupprimerQuelle est le lien de parenté entre Renart et Tibert
RépondreSupprimerIsengrin est son oncle
Supprimer