dimanche 15 mai 2011

À la cour du roi Noble - Brun battu par les paysans




Quand Brun se voit enfermé là-dedans,
Q


uant Bruns se voit enclos laiens,
il lui est impossible de s'échapper.
« Ah ! fait-il, Renart, Renart,
bientôt vous pendrez à une corde.
Si je peux me tirer de cette affaire,
je vais tellement vous battre et vous frapper !
— Ah ! Dieu, dit Tibert le chat,
comment il nous a tués, ce sale teigneux,
ce rouquin puant, ce trompeur !
Ça se saura dans tout le pays. »
Et voici que se pointent messire Frobert,
maître Constant et maître Robert.
Ils entendent seigneur Brun se lamenter.
Ils vont écouter contre la paroi,
et quand ils comprennent que c'est seigneur Brun :
« Par les dents de Dieu, dit l'un d'eux,
c'est Brun l'ours, et Tibert le chat,
un haubert ne leur sera pas utile ;
quatre fois ils m'ont fait des dégâts. »
Peu s'en faut que le paysan n'enrage.
Il appelle tous ses voisins,
ses parents et ses amis :
« Par ici, barons, par ici, à l'ours ! »
Alors, les paysans arrivent à grand galop,
ils emportent fléau ou massue,
ça sera un grand miracle s'ils ne le tuent pas.
Tigart arrive, et Brisefouace,
et le fils de Robert de la Place,
et Heudebert Bruisebrachie,
il a même appelé sa femme,
il porte une grosse masse au cou.
Le miel du pot va porter malheur à seigneur Brun,
tous menacent de l'écorcher vif.
Même le fils de Caillot le vacher
jure, que de son cuir, il fera des lanières
pour seigneur Frobert qui est son oncle.
Il se précipite à la porte, entre à l'intérieur,
et Brun l'ours donne un coup de dents
pour essayer de le saisir au poing droit,
mais l'autre le frappe du côté gauche.
Heudebert le tape avec sa masse,
il joue avec lui comme avec une soule.
Ils lui battent tellement les os et la peau
qu'il devient plus mou qu'un vieux chiffon.
Tibert le regarde, et les voit faire,
peu s'en faut qu'il devienne fou furieux.
Mais il a une telle peur et une si grande douleur
qu'il se précipite dans un boyau.
Il ne reste personne dans le village
sauf seulement madame Poufille,
qui ne soit pas en train de frapper l'ours.
Dix d'un côté, sept de l'autre, trois par ici, quatre par là,
tous ensemble, ils battent seigneur Brun l'ours.
Et Renart écoute dehors,
puis il se dit en son âme et conscience,
qu'il pourrait bien soulager
messire Gombert d'une oie grasse,
sinon il ne s'en mettra jamais une sous la dent.


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De l'eschaper est il noiens.
« Haï ! fait il, Renart, Renart,
Encor pendrez a une hart.
Se de ceste puis eschaper,
Je vos cuit tant batre et fraper.
— Ha ! Diex, ce dist Tybert li chaz,
Con nos a mort cil ort rachaz,
Cil rous puant, cil bareterres !
Seü sera par toutes terres. »
Es vos poingnant sire Frobert,
Et dant Costant et dant Robert.
Dant Brun oïrent gramenter,
Lez la paroi vont escouter,
Quant il oent que c'est dant Bruns :
« Por les denz bieu, ce dist li uns,
C'est Bruns li ors, li chaz Tybert,
Ne li avra mestier haubers,
Qatre foiz m'ont il fet donmage. »
Par poi que li vilains n'enrage.
Il apele toz ses voisins
Et ses parenz et ses amis :
« Or ça, baron, or ça, a l'ors ! »
Et li vilain viengnent grant cors,
Qu'il porte flael ou maçue,
Grant merveille ert s'il nel tue.
Tigarz i vint, Brisefouace,
Et le filz Robert de la Place,
Et Houdeberz Bruisebrachie,
Neïs sa fame a il huchie,
A son col porte une grant bole.
Mar vit dant Brun le miel de l'orle,
Tuit le menacent d'escorchier.
Nis le filz Caillot le vachier
Jure du cuir fera reonges
A dant Frobert qui est ses oncles.
Vint tost a l'uis, s'entre dedenz,
Et Brun li ors jete les denz
Qui le volt saisir au poing destre,
Et cil le fiert devers senestre.
Hodeberz le fiert de sa boule,
De lui joue con d'une soule.
Tant li batent et os et pel
Que plus fu mol du viez drapel.
Tybert l'esgarde, si les voit,
Par .I. petit qu'il ne desvoit.
Tel peor a et si grant duel,
Boutez s'en est en .I. bouel.
Nus ne remest dedenz la vile
Fors seulement dame Poufille,
Qui tuit ne soient a l'ors batre.
Ça .X., ça .VII., ça .III., ça .IIII.,
Trestuit batoient danz Brun l'ors.
Et Renart escoutoit defors,
Et si se pense en son corage,
Car puet il bien fere donmage
Sire Gonbert d'une crasse oe,
Ja mes n'en metra en sa moe.
Comment Ysengrin alla se plaindre de Renart à la cour du roi Si conme Ysangrin s'ala plaindre de Renart a la cort le roi (9)
Notes de traduction (afficher)

2 commentaires:

  1. Quelques détails: au v. 5240: il nous a tués. Au v. 5260: le fils de Robert. Au v. 5269: "entre dedans" semble renvoyer à "la porte". Je propose "entre dans la salle", ou simplement "entre". Au v. 5277: "Tybert les voit faire", non "voient".

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    1. Les fautes sont corrigées, merci de les avoir signalées.

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