vendredi 26 mai 2017

Renart médecin - Ronel raconte ses malheurs




Alors qu'ils se moquent tous du mâtin,
Q


ue qu'i gaboient le gainnon,
le roi et ses compagnons arrivent.
Le roi descend de son cheval devant la grand-salle,
et Ronel tombe aussitôt à ses pieds.
« Sire, fait-il, grâce à Dieu,
je suis revenu, mais au prix de grandes souffrances.
J'ai fait tout ce que vous m'avez demandé,
j'ai été là où vous m'avez envoyé,
j'ai donné votre lettre à Renart,
et je lui ai dit de votre part
qu'il se présente à vous aujourd'hui même
sans plus attendre.
Il m'a répondu aussitôt
de manière enjouée
qu'il viendrait sans délai.
Alors, nous nous sommes mis en route
sur-le-champ dans la bonne humeur.
Je lui ai demandé de trotter
pour accélérer l'allure,
mais le traître m'a répondu
qu'il ne pouvait pas aller plus vite.
En fait, il cherchait à me tromper,
et m'a répondu avec complaisance
et courtoisie, qu'avancer
tranquillement au pas
nous épargnerait de la fatigue.
J'ai cédé à sa requête,
et nous avons continué notre route.
Alors que nous marchions,
le traître que j'amenais,
m'a trompé avec son discours,
en me faisant croire qu'un piège,
sur le chemin, était en fait la relique
de saint Hilaire,
et qu'il fallait que je l'embrasse
avant de continuer.
Je pensais qu'il disait la vérité,
et que ça ne pouvait pas me faire de mal,
alors j'y suis allé aussitôt
afin de vénérer la relique.
Mais, j'ai été bien bête,
car je me suis retrouvé pendu par le cou,
et j'ai bien cru que mes yeux
allaient sortir de leurs orbites.
Il a trahi ma confiance,
ce traître, ce parjure,
ce perfide, ce tricheur,
ce faux témoin, ce déloyal, ce malhonnête,
qui ne cesse d'abuser et de tromper le monde.
Il m'a laissé pendu là dans la vigne,
en ajoutant de bien la garder
sans m'en éloigner.
Après m'avoir dit cela, il s'en est retourné,
en me laissant seul à mon sort.
Deux paysans sont arrivés peu après,
chacun avec une massue à la main,
et m'ont tellement roué de coups
que j'en ai les flancs en compote.
Que puis-je dire d'autre
sinon vous décrire mes misères ?
Chacun m'a battu à son tour
jusqu'à m'en briser le crâne.
Sire, si ce que je dis n'est pas vrai,
alors faites-moi pendre ou noyez-moi,
je ne m'y opposerai pas,
mais si Renart veut nier les faits,
je suis prêt à le combattre
et à le vaincre ici même dans cette cour.
Sire, il est temps de se venger,
car il ne nous cause que des malheurs.
Vengez cette humiliation, qui est aussi la vôtre,
que Renart m'a fait subir en chemin. »
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Li rois vint et si compaingnon,
Devant la sale descendié,
Et cil li est chaü au pié.
« Sire, fait il, por Dieu merci,
A grant dolor sui venuz ci.
Bien fis ce que me conmandastes
Et le mesage ou m'envoiastes.
Vos letres porté a Renart
Et si li dis de vostre part
Que devant vos fust hui cest jor,
Qu'il n'i avoit plus de sejor.
Et il me respondi errant
Et si me dist joieusement
Que il viendroit sanz delaie.
Puis nos meïsmes a la voie
Liez et joianz sanz demorer,
Et je le semons de troter
Por plus tost aler .I. petit,
Et li traïtres si me dit
Que ne pouoit plus tost aler.
Por ce qu'il me voloit lober,
Me respondi que belement
Alisons et cortoisement
Tout souavet et tot le pas
Por ce que ne fussons trop las.
Je li otroiai son plaisir,
Lors conmençames a venir.
Endementieres que venoie,
Li traïtres que j'amenoie
M'abriconna de sa parole
Qu'il me fist d'une çooingnole
Acroire que c'ert saintuaire
Et que la gisoit saint Ylaire,
Et si me dist que le baisasse
Ançois que je outrepassasse.
Je cuidai que voir me deïst
Et que nul mal ne me feïst,
Cele part ving sanz demorer
Por le saintuaire aourer.
Au derreain me ting por fol,
Qar g'i fui penduz par le col
Si que a poi li oil du front
Ne me volerent contre mont.
Ce me fist en ma compaingnie
Li traïtres, le foimentie,
Li traïtres et li tricherres,
Li faux, desloiax et li lerres,
Qui le monde abete et engingne,
Pendant me lessa en la vingne
Et dist que la vingne gardasse
Et de la ne me remuasse.
Quant il ot ce dit, si s'en torne,
Si me lessa pensis et morne.
Tantost me vindrent dui vilain,
Chascun sa maçue en sa main
Qui tant me donerent de coux
Que touz les costez en ai moux.
Que vos iroie je disant,
Ne mon domage devisant ?
Chascun me bati sa foiaie
Tant que la teste ai peçoiaie.
Rois, s'i n'est si con vos ai dit,
Je vos otroi sanz contredit
Que me faciez pendre ou noier,
Et se Renart le velt noier,
Pres sui que vers lui me combate
Et que en nostre cort le mate.
Rois, or en prenez la venjance,
Que mout a ci grant mescheance.
Vengiez vostre honte et la moie
Que Renart m'a fait en la voie. »
Comment Renart fut magicien C'est la branche Renart si com il fu mires (29)
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